« Je me souviens »
HISTOIRE DE MON ECOLE
J’avais une dizaine d’années et comme tous les petits-fils, je posais beaucoup de questions au sujet de l’école à ma grand-mère maternelle (née en 1864). Elle m’avait répondu qu’elle avait commencé l’école à 6 ans et comme l’école (située à Druillat) était éloignée de 4 km, elle n’y allait que 2 ou 3 jours par semaine.
A la belle saison, elle fréquentait peu l’école car elle devait aider ses parents aux travaux des champs et aux travaux domestiques. L’école du Roset n’existait pas à cette époque.
Certains enfants domiciliés au hameau de la Ruaz fréquentaient l’école de Dompierre, celle-ci étant située à la même distance que celle de Druillat.
D’après les registres de délibérations du conseil municipal, c’est en 1879 que Mr C….. C……. (membre du conseil municipal et élu maire en 1881) exposa à la municipalité la nécessité de construire une école au Roset. A l’unanimité, la proposition fut approuvée. Il fallait donc engager toutes les procédures en vue de cette construction. Il fallut demander l’autorisation au Préfet qui donna une réponse positive en juillet 1880. Une commission se rendit au Roset pour définir l’emplacement du bâtiment et contacter le propriétaire du terrain: Mr G….. . Celui-ci, n’habitant pas dans la région, ne donna pas sa réponse dans l’immédiat. Mr G….. était favorable à la construction de l’école et vendit son terrain à la commune pour un prix estimé par l’architecte à 1477 francs. Il fallut donc établir
le plan de financement. L’architecte estimait le coût de la construction à 12 000 francs. L’Etat accordait une subvention de 7 000 francs, la somme restante était à la charge du hameau du Roset. Par conséquent, comment trouver les fonds nécessaires à cette dépense?
Et c’est là qu’interviennent les bois communaux du Roset dont je vous conterai
l’histoire au cours de la 2ème partie de ces mémoires.
Le Roset possède 35 hectares de bois communaux répartis en quatre parcelles: deux sont réservés aux affouagistes, les deux autres sont des coupons de réserve et peuvent se vendre quand le bois est à maturité (minimum 22 ans). Le 1er coupon estimé à 5 700F ne pourra se vendre qu’en 1888. Cette vente ne pouvant pas assurer le financement immédiat de la construction, il a fallu emprunter cette somme à la Caisse des Dépôts et Consignations. Le hameau dut payer les intérêts et pour pourvoir à cette dépense, il avait été proposé de vendre deux petites parcelles (normalement réservées aux affouagistes). Or le Ministre de l’Agriculture, par lettre adressée au maire le 7 octobre 1881, refusa l’autorisation de la vente estimant que ce bois était réservé strictement pour le chauffage des habitants du hameau.
Une autre solution fut donc trouvée afin de ne pas retarder la construction (j’ignore laquelle car rien n’est consigné dans le registre des délibérations à ce sujet…)
En 1883, l’école était fonctionnelle, un instituteur était nommé. Les enfants du Roset, de La Ruaz, de Montbègue ainsi que ceux des fermes de Ponsuard et La Vrandière (commune de Varambon) et plus tard ceux de la ferme de Chareyziat (commune de Priay) pouvaient se rendre à l’école.
Mes parents, Victor Janton et Marie-Henriette Chêne, ayant débuté l’école en 1898, m’ont confié que leur maître, Mr M…… enseignait à une cinquantaine d’élèves, garçons et filles, dans une classe immense où il faisait régner le silence, l’ordre, le respect, le travail.
Tout ce petit monde avait souvent plus de 2 km à faire par tous les temps, à pied et en sabots. Les plus éloignés ne rentraient pas chez eux à midi: ils apportaient leur gamelle qu’ils faisaient réchauffer sur le gros poêle installé au milieu de la pièce et qui servait aussi de sèche-linge…
Plus tard, une « dame de coupe » fut nommée afin de donner des cours de couture aux filles de la classe. Dans les années qui suivirent, le nombre d’élèves augmenta et la dame de couture demanda l’autorisation de pouvoir aider le maître qui ne pouvait plus assurer tout seul sa tâche.
En 1901 furent construits le préau et le mur de clôture. La même année, le maire demanda la construction d’une deuxième classe côté sud avec aménagement d’un logement à l’étage. Le Préfet et l’Inspecteur d’Académie donnèrent un avis favorable pour cette construction dont le coût fut estimé à 6 650 F. L’Etat accorda une subvention de 4 921F. La somme de 1 729F restant à la charge du hameau fut compensée par la vente du deuxième coupon de réserve des bois communaux. La deuxième classe fut fonctionnelle en 1907. La surface de la grande classe fut alors réduite de 4m par la construction d’un galandage. La création de ce petit local fut destinée au bûcher et à l’installation d’une chaudière en fonte. Celle-ci
permettait de faire cuire la soupe (les parents fournissaient les légumes) pour les enfants qui restaient sur place à midi. Une dame fut embauchée pour ce travail. Dès la fin des cours, dans la classe des petits, une grande table était installée sur des tréteaux pour le repas. Un maître suppléant fut nommé sur le deuxième poste. Mr et Mme N…. furent nommés en 1920, puis Mr et Mme G….. leur succédèrent. La maîtresse s’occupait des plus petits et le maître des plus grands. En 1939, Mr G….. fut mobilisé et Mme G….. dut alors assurer seule l’enseignement pour les deux classes. En juin 1940, Mr G….. retrouve son poste. Suite au départ en retraite de Mme G….. en 1942, Melle T….. de Lent la remplace.
J’ai effectué toute ma scolarité avec Mr et Mme G….. . Ceux-ci m’ont permis de passer mon certificat d’études en 1939. En 1946, Mr G….. demanda son changement et fut nommé à Saint Jean le Vieux, Mr et Mme B…….. s’installèrent à l’école du Roset. Vers 1952, le nombre d’élèves diminue et l’académie supprime un poste et les maîtres s’en vont à Cuet. Alors, vont se succéder dans la classe unique, jusqu’en 1979:
Mme F……., Melle M……, Mme M…….., Mme S……., Mr C……, Melle L….., Mme T…….., Mme B…….., Mme M……. .
Au conseil municipal, nous étions conscients de la prochaine suppression du poste au Roset. Aussi, nous décidâmes de construire un groupe scolaire (fonctionnel en 1980) qui permettrait de recevoir au bourg les classes du Roset et de Turgon. En attendant cette construction, un local étant disponible à Druillat, ce qui permit d’accueillir pour une année, les élèves du Roset et leur maîtresse. Le poste était ainsi conservé, seulement transféré. Un ramassage scolaire fut organisé et il existe encore de nos jours. Les locaux de l’école du Roset étant disponibles, ceux-ci furent loués au Sou des Ecoles de Pont d’Ain qui les aménagea afin d’ouvrir un centre aéré.
Ce centre de vacances accueillait les enfants des communes environnantes, ainsi, l’ancienne école retrouvait son âme avec les cris et les rires des enfants. Hors congés scolaires, les locaux pouvaient être loués à des associations ou à des particuliers pour diverses manifestations. Après une dizaine d’années, le Sou des Ecoles de Pont d’Ain, pour des raisons financières, mit fin aux activités du centre
aéré. En 2002, l’ancienne école fut vendue en temps que maison d’habitation.
Ainsi, se termine l’histoire de l’école du Roset, de mon école.
Classe de mes parents en 1903. Leur instituteur était Mr M…… .
Ma classe en 1937. L’instituteur était Mr G….. .
La classe de P….. C…… en 1959.